70 personnes ont répondu à l’invitation de la Librairie Paulines pour le lancement du livre « Autrement que victimes. Dieu, enfer et résistance chez les victimes d’abus sexuels ». La soirée était organisée en collaboration avec les éditions Novalis et le Centre de services de justice réparatrice.
Le livre présenté par les trois auteurs, Jean-Guy Nadeau, Carole Golding et Claude Rochon, aborde un thème peu abordé jusqu’ici. Il cherche à comprendre la position de la victime par rapport à ses propres croyances. Car, en effet, comment continuer à croire quand on est victime d’abus ? Quel sens donner à sa relation à Dieu quand on subit des abus à répétition et qu’on prie pour que cela s’arrête ? Comment envisager la possibilité du pardon, sans en faire une obligation ?
« Explorant les liens entre agression sexuelle, religion et soumission, les auteurs suivent les parcours de croyantes et de croyants victimes de tels abus durant l’enfance afin de mettre en lumière le travail de résistance dans l’expérience religieuse des victimes. S’adressant aux victimes et à leurs alliés, intervenants ou accompagnateurs, ils dénoncent la manipulation par la religion, à moins que celle-ci ne fournisse des ressources pour garder vivante l’espérance, lutter et se relever le cas échéant. » (4e couverture du livre)
Le phénomène des abus sexuels n’est pas un fait isolé. Une femme sur quatre, et un homme sur six, serait victime d’abus sexuels avant l’âge de 18 ans. C’est donc une réalité qui nous concerne toutes et tous. Car un abus touche une victime. Mais cela concerne aussi son entourage, son cercle familial et social et donc la société dans son ensemble.
« Ce livre veut aussi briser l’image de personnes victimes « écrasées » dans leur vie et montrer que, malgré tout, leur vie est toujours « vivable ». Car, mêmes si ces personnes ont « une immense blessure », certaines d’entre elles réussissent à panser cette blessure, notamment au moyen de la spiritualité.
Le témoignage d’une personne, ayant été elle-même victime d’abus sexuels dans l’enfance, et ayant participé à une série de rencontres détenus-victimes, a été particulièrement touchant. C’était comme une « empreinte dans mon corps », a-t-elle indiqué en partageant son chemin pour sortir de la peur, la tristesse, la honte et la culpabilité. Et puis avec les abus viennent aussi les doutes qui s’installent peu à peu : est-ce que cela m’est vraiment arrivé ? Comment vivre avec ça ? La confusion, le manque de confiance en soi et l’anxiété sont omniprésents. Mais aujourd’hui, elle reconnait l’importance de sa propre foi pour trouver une certaine sérénité d’esprit. Sa relation à Dieu, et une profonde expérience spirituelle, lui ont « appris à se laisser guérir par son Amour » et à redevenir actrice de sa vie.
Cette soirée nous a montré que les victimes d’abus ont la capacité de « résister » au fait de se sentir écrasées, et qu’elles peuvent se vivre autrement que victimes : « Le salut concerne l’identité de soi, celui qui retrouve la parole, qui refuse de se résigner ».
Eloïse Chartier et Estelle Drouvin